Expositions : Cités-jardins : voyage au cœur d’une utopie
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Montrer la diversité comme les traits communs des quelque 80 cités-jardins d’Ile-de-France : c’est l’objectif de l’exposition itinérante « Les cités jardins d’Ile de France : une certaine idée du bonheur ». Cette dernière, créée par le Musée d’Histoire Urbaine et Sociale de Suresnes (MUS), avec le soutien de l’Association régionale des cités-jardins d’Ile de France, voyage sur l’ensemble du territoire francilien depuis 2020.
A partir du 1er février, elle sera accueillie par le palais du Roi de Rome qui l’a enrichie d’une salle dédiée à l’histoire de la Cité jardin des Eveuses, exemple architectural rambolitain, encore habitée aujourd’hui. Grâce à de nombreux témoignages et documents iconographiques collectés auprès d’habitants ou tirés des fonds patrimoniaux mais aussi à une carte interactive ou à un film, vous pourrez découvrir l’origine de ce phénomène urbain et les spécificités de sa transposition en île de France dans l’entre-deux guerres et même au-delà.
Réunir les avantages de la ville et de la campagne
Théorisée par l’urbaniste anglais Ebenezer Howard en 1898, la cité-jardin est un concept conciliant harmonieusement urbanisme, nature et qualité de vie, véritable modèle alternatif aux conditions de vie insalubres des grandes villes industrielles. En effet, à l’aube du 20ème siècle, l’exode rural constant de populations en recherche de travail aboutit à une surpopulation dans les grandes villes européennes qui engendre des problèmes d’hygiène et de santé. Les travailleurs les plus pauvres vivent, parfois en famille, dans de petits appartements sans eau, chauffage ou électricité.
Ebenezer Howard imagine alors une ville située à la campagne, offrant un équilibre entre emploi et habitations, agriculture et industrie, qui proposerait à ses habitants des équipements nécessaires à la vie de quartier (écoles, crèches, dispensaires, théâtres, piscines…), des commerces et des services. En bref, qui réunirait les avantages de la ville et ceux de la campagne dans un cadre agréable. Le tout accessible à des loyers modiques, avec des salaires élevés et fonctionnant en autarcie.
Dès 1903, cette utopie devient réalité avec la création de la première cité-jardin, Letchworth Garden City, sur un terrain de 16 kilomètres bientôt visité par des personnalités et urbanistes du monde entier. Le concept de cité-jardin trouve rapidement un écho qui dépasse les frontières de l’Angleterre et même de l’Europe et donne lieu à de nombreuses adaptations en fonction des pays.
La cité jardin à la française
Dans l’Hexagone, une association des cités-jardins de France voit le jour dès 1904 mais il faudra attendre l’entre-deux-guerres pour voir apparaître une véritable vague de réalisations qui vont inspirer la politique du logement social. Entre 1920 et 1940, plus de 80 cités-jardins, soit environ 12 000 logements, sont construites en Ile de France principalement sous l’impulsion de l’Office public des HBM – soit des habitations à bon marché, ancêtre des actuels HLM – du département de la Seine (OPHBMS).
S’éloignant du concept original, les constructions françaises ne s’installent pas en pleine campagne mais sur les terrains vacants des villes proches de Paris et ne cherchent pas à fonctionner de manière autonome. Cité-jardin d’Orgemont et Blumenthal (Epinay sur Seine), du Marais et du Perreux (Argenteuil), de la Poudrerie (Livry Gargan), du Pré-Saint-Gervais, de Champigny sur Marne… : si leurs physionomies sont très différentes, mixant logements collectifs et individuels, elles répondent toutes à des objectifs de confort, d’hygiène et d’esthétisme et permettent de faire cohabiter toutes les catégories de la population, notamment les plus modestes dans un environnement riche en espaces verts.
L’exemple de la cité-jardin de Suresnes
Plusieurs éléments architecturaux les rendent reconnaissables : le clos – espace partagé entre les riverains dans une voie sans issue bordée de logements -, le portique qui signale l’emplacement de la cité jardin et la venelle, petit chemin piétonnier qui permet de circuler de manière alternative et rapide à l’intérieur de la cité.
L’une des cités-jardins les plus abouties a été construite à Suresnes entre 1921 et 1956. Classée site patrimonial remarquable, elle a été conçue par l’architecte Alexandre Maistrasse, s’étend sur 34 hectares et accueille à l’époque entre 800 et 1000 personnes, toutes catégories socio-professionnelles mélangées. Les logements sont modernes – électricité, chauffage, tout à l’égout ou eau courante… – et de nombreux équipements sont à disposition des habitants ; lieux de cultes, bains-douches, dispensaire, groupe scolaire, centre de loisirs, square…
Les cités-jardins aujourd’hui
Plus d’un siècle après leur naissance, les cités-jardins sont toujours d’actualité. Même si certaines ont subi des transformations pour s’adapter aux exigences contemporaines, le principe d’un équilibre entre nature et urbanisme reste vivace. A l’heure d’une attention accrue à la végétalisation des villes, le concept de ce phénomène urbain inspire encore certains urbanistes notamment pour la construction des écoquartiers.
Pour en savoir plus, vous pourrez assister à l’apéro-patrimoine « Quel avenir pour les cités-jardins du 21ème siècle ? » organisé le 7 mars (19h) au palais du Roi de Rome. Ce dernier proposera de nombreuses animations en lien avec l’exposition, visites conférences ou ateliers variés pour les enfants !